S'il te plaît, ne m'apprivoise pas !

     ... Si je viens jusque dans ta main c'est parce que je sais que tu ne vas pas chercher à me retenir, et c'est aussi parce qu'il n'y a pas forcément quelque chose de bon pour l'oiseau que je suis, à picorer dans le creux de ta main...

Il n'y a peut-être même dans ta main, rien du tout !

J'ai vu que ta main vibrait comme la feuille d'un arbre alors que la brise était toute petite, et je me suis un instant posé sur cette main, pensant y revenir et me souvenant toujours de cette vibration que j'ai aimée...

 

... Apprivoiser un être, ne serait-il pas : le faire autre que l'être qu'il est, selon l'idée qu'ainsi, ce sera mieux pour lui (et en même temps, nous arrangerait bien) ?

 

...Apprivoiser un lieu et ses hôtes, ne serait-il pas : faire en son esprit, en sa pensée, déjà avant même d'entrer en ce lieu et d'en rencontrer ses hôtes, un univers familier et intime -et parfois singulier- en lequel on se préparerait, tout doucement, sans la moindre effraction, à y pénétrer ?

Et ensuite, osant y entrer vraiment, oser aussi, y livrer son coeur, une fois reconnu ce lieu et ses hôtes, une fois que ces hôtes en ce lieu se soient approchés et qu'ils aient senti ?

 

... Mais livrer son coeur", c'est beaucoup ! Et c'est même dans la plupart des cas, dans la relation humaine... assez vain, voire inutile...

Et pourtant... Nous sommes si nombreux à souhaiter ou à envisager de le faire !

 

... Livrer son coeur, cela suppose à mon sens, d'être conscient de la réalité de la relation existante entre soi et l'autre ou les autres, afin de pouvoir décider si oui ou non on se livre et dans quelle mesure... Et encore!...

Il y aurait une voie possible : celle de l'écriture sous une forme plus ou moins imagée ... Tous écrits produits qui, vaille que vaille, expriment ce que l'on ne saurait ou n'oserait dire...

Mais il y a un risque évident : celui de se révéler obscur, voire illisible... ou de voir le "pétard amorcé" puis lancé... revenir te péter à la figure !

 

C'est difficile d'être pudique et, paradoxalement, de souhaiter cependant s'extérioriser !

 

Je pense que l'on dit trop rarement ce qu'on aime en l'autre et ce qu'il devrait développer davantage...

Je pense que l'on dit trop souvent ce qu'on n'aime pas en l'autre et ce qu'il devrait cesser de faire ou d'exprimer...

Il y a un équilibre, un juste équilibre à trouver, entre dire ce que l'on aime et dire ce que l'on n'aime pas... Et, avec l'équilibre à trouver en s'y maintenant, la manière de dire...

 

Quelque part je me dis que le monde appartient à celui (ou à celle) qui ose dire et faire...

Mais je me dis aussi que le silence peut être un coup de poing... ou un sourire...

Un coup de poing à l'adresse d'un être qui nous a blessé ou qui a exprimé son mépris, son indifférence, son impudeur, sa faconde, ses certitudes, son jugement hautain et réducteur...

Un sourire que l'on porte au dedans de soi, à l'adresse d'un être dont on a découvert l'existence...

Ainsi le silence pourfend, accuse ou dénonce...

Ainsi le silence adhère, accepte ou aime...

 

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